Seul le changement est constant.
À première vue et seulement à première vue, la phrase précédente est absurde. Elle établit en fait une relation interactive entre l’existence et le mouvement, conditionnant la permanence de la matière et de l’esprit par l’existence du changement.
La symbolique cardinale du voyage est l’existence du changement qui, par l’expérience du voyage, s’imprime dans la personne qui voyage. Ce n’est pas une fuite mais une aspiration au développement, au progrès, un désir que l’homme individuel se connaisse lui-même et qu’il sorte de l’obscurité de l’ignorance vers la lumière de la connaissance.
Alors que je m’asseyais dans le cabinet de réflexion, regardant le reflet de mon visage dans le miroir, seul avec moi-même et à la recherche du moyen par lequel l’homme reste raisonnable et de ce qui est l’archétype de ce que nous sommes, je n’étais pas encore conscient du poids du voyage pour lequel je me préparais, un voyage sur lequel il y a l’espoir que je verrai mon visage tel qu’il est vraiment.
Chaque voyage commence par un premier pas et ce pas est toujours difficile. Il faut se décider. Quand j’étais dans l’obscurité, qui soulignait l’obscurité dans laquelle nous sommes d’ailleurs, guidé et soutenu par une main fraternelle, agenouillé, je passais par une démonstration symbolique des tentations et des passions de la vie, dans la direction qu’elle est pour ceux qui ne savent pas, confus et mal à l’aise, je devais répondre à la question de savoir si je me soumettais volontairement à la tentation, je me suis souvenu d’une histoire.
L’histoire de la Chambre où se réalisent les désirs les plus cachés des humains. Le chemin vers la Chambre est difficile et plein de dangers. Un homme, qui avait perdu son frère par sa faute, fit cet énorme effort pour arriver à la Chambre et y souhaita de tout son cœur le retour de son frère. Après un certain temps, il se suicida. Pourquoi ? Il s’était enrichi. La Chambre avait exaucé le désir qu’il cachait même à lui-même et non celui qu’il pensait être le plus précieux. C’est pourquoi beaucoup n’osent pas entrer dans la Chambre, craignant de découvrir ce qu’ils sont vraiment. La décision d’entrer est la décision de s’engager dans la partie inexplorée et à la recherche de soi-même.
Dans le contexte de cette histoire apocryphe, je vous pose la question : auriez-vous le courage d’entrer dans cette Chambre imaginaire, qui vous exaucerait le vœu le plus caché, sans que vous puissiez influencer consciemment le choix ?
Sommes-nous tous ici, par notre réponse affirmative à la soumission volontaire aux épreuves pour trouver la lumière, en fait positivement répondu à la question précédente ?
J’espère que mon Oui, et chacun de nos Oui individuels, est une décision dépourvue de curiosité et d’attentes éphémères, un acte par lequel je me suis décidé, en tant que candidat, à emprunter le chemin au bout duquel, à la lumière des connaissances acquises, je parviendrai à la phrase clé du Décalogue – que je me connaîtrai moi-même. Je veux croire que ces premiers pas et ce premier voyage sont le reflet de l’espoir que la propriété essentielle de l’homme, celle qui se cristallise dans l’esprit de chacun de nous et qui constitue la plus grande valeur, ne peut être dégradée, cachée et perdue à jamais.
C’est un voyage dans l’inconscient. Aussi étrange que cela puisse paraître, l’inconscient est structuré comme un langage, à l’aide de signes, de métaphores et de symboles. Le sens de ce langage réside dans sa fonction de système. Il faut séparer ce langage en tant que système de ses manifestations réelles. Le voyageur – le signifiant et le but du voyage – le signifié forment le signe – le Voyage. Le voyage est un processus qui relie le voyageur et son but dans un processus déconstructif de découverte et de déshabillage des couches de significations construites jusqu’à son essence, jusqu’au but où les mots deviendraient la chose réelle – la Parole incarnée.
Comme dans un cercle métaphysique, j’espère que le reflet de mon visage dans le miroir du cabinet de réflexion, à la fin, ne sera qu’une partie du reflet de nous tous qui avons désiré et osé emprunter les voies de l’art royal.
Boban Savković